Cet article est une retranscription audio, le langage utilisé peut différer d’un article habituel.
Je voulais vous parler des responsabilités du porteur de projet animalier. C’est quelque chose que j’entends beaucoup dans les questions que l’on me pose en entretien individuel, en rendez-vous :
« Voilà, je voudrais me lancer, mais je ne sais pas dans quoi je mets les pieds » ;
« Je ne sais pas quelles vont être mes responsabilités » ;
« Je ne suis pas sûr d’être capable de le faire » ;
« Est-ce que ça va chambouler mon quotidien ? »…
Je vais répondre à un certain nombre de ces questions, en prenant l’angle de vue des responsabilités que vous allez avoir. Je vais beaucoup parler de charges, de poids sur les épaules. Non pas pour vous faire peur, mais pour vous faire prendre conscience de plusieurs éléments. Vous vous lancez dans un projet professionnel en lien avec l’animal et cela implique un certain nombre de responsabilités… J’en dénombre au moins 7.
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La première, c’est ce qu’édicte le droit, la législation, ce sont des responsabilités juridiques.
Les responsabilités juridiques
On va distinguer deux types de responsabilités juridiques : une responsabilité juridique civile et une responsabilité pénale.
Comment est-ce qu’on fait la différence entre les deux ?
La responsabilité civile
C’est la responsabilité que vous avez vis-à-vis des personnes auprès de qui vous pourriez causer un dommage. Un dommage en lien avec un accident par exemple, ou un dommage en lien avec une mauvaise exécution d’un contrat…
Je vais vous donner quelques exemples : vous avez un parc animalier ou une ferme pédagogique. Maintenant, imaginez que quelqu’un tombe, se fait mordre, se fait piquer par les abeilles qui ne sont pas à vous, mais qui sont là quand même… Eh bien, vous avez une responsabilité parce que ça s’est passé chez vous.
Ce qui va déboucher d’une responsabilité civile quand elle est enclenchée, c’est peut-être, dans certains cas, la nécessité de pouvoir indemniser la personne qui est victime de ce pour quoi vous êtes responsable. Donc, on va parler d’une indemnisation.
Le meilleur moyen de vous prémunir de tout ça, c’est de souscrire à une assurance. Et je pense que ça fait partie du b.a.-ba. Vous devez avoir une assurance de responsabilité civile.
La responsabilité pénale
C’est la réparation d’un dommage que vous aurez causé à la société en général.
Par exemple, quand on commet un crime, on a une victime. Elle est très facile à nommer, c’est la personne qui est décédée. On a aussi le fait que vous avez violé une loi qui est : qu’on ne doit pas commettre un crime. Donc, que vous avez commis quelque chose contre la société. Il y a une réparation à faire contre la communauté. Souvent, ce sont des travaux d’intérêts généraux quand ce n’est pas trop grave. Des amendes quand ce n’est pas trop grave non plus. Et jusqu’à des peines d’emprisonnement dès que ce que vous avez fait est grave.
Là, il n’y a pas de moyen, il n’y a pas d’assurance pour vous prémunir d’une responsabilité pénale. Par contre, il y a des moyens de prévention que vous devez mettre en place, un certain nombre de protocoles. Vous devez éviter que les risques les plus graves se passent. Et là, on parle de sécurité et d’hygiène notamment.
La deuxième responsabilité dont je voudrais vous parler, c’est une responsabilité financière et économique.
Les responsabilités économique et financière
C’est important d’en parler ! C’est la première à laquelle on pense quand on se lance dans ce type de projet. On se dit « je ne vais plus avoir de rémunération, je vais être chef de ma propre entreprise, de mon propre projet. Maintenant comment je fais pour pouvoir payer un salaire, me payer un salaire tous les mois ? ».
La responsabilité économique
Ça, c’est une responsabilité que vous avez envers vous-même. Mais vous avez aussi cette même responsabilité vis-à-vis des personnes que vous embarquez avec vous dans votre projet. Par exemple, des personnes que vous voudriez salarier, embaucher… Donc, vous devez être sûr que vous pouvez subvenir à leur rémunération tous les mois, parce que le salaire, c’est tous les 30 jours.
La responsabilité financière
On a également une responsabilité vis-à-vis de ses partenaires. Ce n’est pas parce qu’ils ne sont pas salariés que vous ne devez pas les payer. Donc, si vous avez fait entrer une tonne de foins pour nourrir vos animaux, vous devez être capable de pouvoir payer vos factures, et de la même manière que n’importe quel partenaire.
Ça va être la même chose au niveau de la gestion de votre trésorerie. On peut avoir une très bonne performance économique, c’est-à-dire faire un très bon chiffre d’affaires tous les mois. Mais être un très mauvais gestionnaire, autrement dit qu’on ne gère pas le moment où on reçoit les encaissements, on oublie de relancer ces clients par exemple et puis on dépense trop et trop vite. Ils vont créer des trous de trésorerie, d’énormes trous d’air dans lesquels vous êtes à découvert. Donc, c’est une autre responsabilité qui est importante.
Elle est plus financière qu’économique et notamment vis-à-vis de votre banque. Et il ne faut pas l’oublier parce que la banque, c’est votre premier partenaire qui vous fait confiance, ou en tout cas, qui vous accorde le bénéfice du doute au début. Et vous ne devez pas trop trahir cette confiance, car qu’on soit pour ou contre les banques, aujourd’hui, dans le système dans lequel on est, on en a encore besoin.
Alors, le moyen de se prémunir contre ces risques, cette responsabilité, c’est de vous assurer un chiffre d’affaires qui est le plus pérenne possible, le plus continu possible et des règles de bonne gestion d’entreprise.
Je vais vous parler de la troisième responsabilité. Cette responsabilité, elle est envers vos animaux ou vos futurs animaux.
Les responsabilités animalières
Quand vous voulez vous lancer dans un projet animalier, certains d’entre vous ont déjà une certaine expérience. Vous savez ce que c’est avoir des animaux, de se lever à 6 ou 7 h du matin, parfois plus tôt même. Vous savez ce que c’est de devoir gérer h24, tous les jours de la semaine, de toute l’année un cheptel d’animaux.
Si ce n’est pas votre cas, vous avez absolument besoin de comprendre cette responsabilité. Vous avez une triple responsabilité vis-à-vis de vos animaux, vis-à-vis des besoins fondamentaux qu’ils peuvent avoir. Vous devez être capable, dans tous les cas, de leur offrir l’alimentation, l’eau dont ils ont besoin et des soins. Souvent, on prévoit un budget alimentation et on peut oublier de prévoir un budget d’urgence, ou même des soins habituels comme des vaccins ou des vermifuges. Donc ça, vous devez pouvoir le prévoir dès le début.
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Le bien-être des animaux
Vous avez aussi une responsabilité vis-à-vis de leur bien-être. Là, ça va au-delà des quelques besoins fondamentaux, mais ça reste fondamental aussi. Je vous invite à vous informer sur le sujet. Il y a une très bonne littérature sur le bien-être, on parle des cinq libertés de l’animal. Ça va au-delà du fait d’être capable de manger et de boire. Il y a des besoins auxquels on doit pouvoir répondre et ça fait partie de vos responsabilités. Si c’est vous le chef de votre projet animalier, vous êtes responsable du bien-être de vos animaux.
Le temps accordé aux animaux
Vous avez aussi une responsabilité vis-à-vis du temps que vous voulez bien leur accorder. C’est votre faute et rien que votre faute si vous n’avez pas le temps de vous en occuper. Et c’est ce que j’ai envie de dire d’ailleurs, à n’importe quelle personne qui adopte un animal. C’est assez insupportable de lire un message de quelqu’un qui donne ou qui revend un animal faute de temps. Ça doit se prévoir dès le début. Vous devez être conscient du temps que va vous prendre la gestion de votre cheptel, le soin de vos animaux ! Sinon, vous n’êtes pas fait pour ce métier-là. J’en suis désolé.
Comme pour tout, il y a un moyen de se prémunir contre cette responsabilité, c’est l’expérience, la connaissance du terrain, le fait d’avoir déjà vécu ça avec un peu moins de responsabilités. Par exemple en ayant été simplement bénévole ou salarié dans une autre structure. Ça vous permet d’avoir conscience du besoin de vos animaux, du temps et du budget que ça va vous prendre également.
On arrive à la quatrième responsabilité, accrochez-vous bien. J e l’appellerai une responsabilité morale que vous avez vis-à-vis de vous-même et vis-à-vis du reste de la société.
Les responsabilités morale et éthique
C’est très important dans le cadre de votre projet que vous définissiez quelle est votre morale et quelle est votre éthique. C’est-à-dire, quelles sont, ce que vous appelleriez, vous, les bonnes pratiques et quelles sont les choses auxquelles vous ne voulez pas vous approcher.
C’est très facile de s’approcher de la mauvaise pratique quand on est la tête dans le guidon parce que parfois, on a affaire à des arbitrages, à des décisions. Et dans le feu de l’action, on peut prendre des décisions qui ne sont pas dans la moralité qu’on aurait voulue.
Le meilleur moyen de se prémunir contre ça, c’est, dès le début de votre projet, de rédiger votre projet éthique, de rédiger une charte par exemple ou un code de bonnes et de mauvaises conduites que vous affichez ou que vous apprenez par cœur. Mais que vous sachiez quelles sont les choses que vous voulez faire et ne pas faire.
Je vous donne des exemples : dans des projets, certaines éthiques, c’est de ne pas faire appel à de l’élevage, mais de n’avoir que des animaux qui sont réfugiés, par exemple, qui sont des animaux de réforme. Dans d’autres projets, on va être, par exemple, sur une surface minimum par animaux. Et donc, on va s’interdire de rajouter plus d’animaux dans un espace qui est réduit.
Ça fait partie des règles auxquelles vous devez réfléchir. Il n’y a pas une règle en général, mais c’est vous, vis-à-vis de vous-même, vous devez réfléchir à tout ça.
On arrive à la cinquième responsabilité que vous avez et cette responsabilité, je l’appelle une responsabilité familiale.
Les responsabilités familiales
On parle de votre cercle le plus proche, du premier cercle. Ce ne sont pas forcément des gens qui vivent dans votre foyer, bien sûr, ils en font partie. Mais ça peut être aussi des personnes auprès de qui vous avez un impact. C’est-à-dire, tout changement qui se passe chez vous a un changement qui se passe chez eux.
Le soutien des proches
Vous devez absolument vous assurer que le projet que vous portez est en adéquation et consentit par les personnes de votre premier cercle. Non pas que ce ne soit pas votre projet, vos décisions, votre propre autonomie, ça on ne vous le retirera pas. Mais vous devez être conscient que vous êtes liés au mode de vie d’autres personnes et que vous pouvez avoir un impact négatif sur ces personnes.
Alors, le meilleur exemple, c’est sur le conjoint ou la conjointe et sur les enfants évidemment. Si vous prenez un risque et que vous partez faire n’importe quel projet, qu’il ne fonctionne pas et que vous ne faisiez plus rentrer de l’argent à la maison, il n’y aura plus d’argent pour payer les études des enfants, il n’y aura plus d’argent pour payer le loyer.
Ce n’est pas ce que je vous souhaite évidemment, mais vous devez vous assurer que vous avez le soutien et la compréhension de vos proches. Qu’ils sachent dans quoi vous mettez les pieds et qu’ils soient conscients que vous allez y aller avec méthode, avec sérieux et en limitant la prise de risque.
Une reconversion en famille
Le meilleur conseil que je donne à chaque fois à un entrepreneur qui veut se lancer, c’est de ne surtout pas se lancer en même temps que son conjoint ou sa conjointe. Parce que très souvent, j’entends : « mon mari, il fait de la maçonnerie, il en a marre, il veut faire de l’élevage d’animaux. Et puis moi en même temps, je veux faire une ferme pédagogique et quitter mon travail dans l’éducation nationale ».
On a un projet d’une famille avec un certain mode de vie, avec peut-être un crédit immobilier, avec des charges… et d’un coup, qui décident, les deux en même temps, de renoncer à une sorte stabilité. C’est faisable, je ne dis pas que ce n’est pas possible, mais vous devez vous être concertés et savoir tous les deux dans quelle direction vous allez et mettre en concertation les personnes de votre entourage.
Donc, c’est une responsabilité importante vis-à-vis de vos proches et il ne faut surtout pas la négliger.
On s’approche de la fin et il nous reste encore deux responsabilités qui sont importantes. Ce n’est pas parce que c’est la sixième qu’elle est moins importante que la première. La sixième responsabilité, elle, est liée à votre professionnalisme et à la qualité de ce que vous allez apporter.
Les responsabilités professionnelle et de qualité
Vous ne pouvez pas partir dans n’importe quelle direction. Vous devez vous assurer que vous avez un certain nombre de compétences, que vous maitrisez ces compétences, que vous allez agir avec méthode et que vous avez l’expérience et la formation nécessaire pour ce que vous prétendez pouvoir faire.
Ce n’est pas une question de diplôme. Ce n’est pas une question de bout de papier que vous pouvez brandir. On n’est pas dans des métiers de médecine, on n’est pas dans des métiers qui sont règlementés. Cependant, vous devez avoir une certaine légitimité, une certaine compétence.
Dans les formations que je propose par exemple, on travaille beaucoup sur cette question du syndrome de l’imposteur de la légitimité. La légitimité, elle ne nait pas d’un bout de papier. Elle nait de votre capacité à analyser des situations, à définir des objectifs et un plan d’action pour créer des animations pédagogiques, pour créer des séances de médiations animales, etc.
La qualité professionnelle, c’est une responsabilité que vous avez. C’est le minimum que vous devez aux personnes qui veulent bien vous payer pour faire ce que vous faites. Ça, c’est évident et c’est normal.
Septième et dernière responsabilité, alors, il y en a peut-être d’autres, si vous en avez, mettez-les-moi en commentaires parce que ça m’intéresse de savoir ce que j’ai pu oublier. La septième, elle est sociale et sociétale.
Les responsabilités sociale et sociétale
Votre projet, il n’est pas concentré sur lui-même, avec pas d’impact sur le reste monde. Alors, ça va au-delà de la moralité dont on parlait tout à l’heure. C’est l’impact que vous avez vis-à-vis de votre environnement. Environnement au sens la nature qui vous entoure, mais avec les gens, la société, etc.
Donc, évidemment, vous avez une responsabilité environnementale au sens écologique du terme, au sens gaya. Si vous avez un élevage, vous devez faire attention à ne pas abimer le sol, rendre le lieu complètement invivable, surpâturé…
Bien sûr, vous faites attention à ne pas détruire la nature, mais je vous fais confiance sur ces sujets-là. Je suis sûr que si vous me lisez aujourd’hui, vous n’êtes pas du clan des personnes qui veulent faire du mal à la nature. Il faut mettre en place des choses pour faire attention.
La responsabilité sociale
Vous avez aussi une responsabilité sociale, qui est vis-à-vis de vos salariés par exemple, de vos partenaires, mais aussi de vos concurrents.
Les concurrents, ce ne sont pas des bêtes féroces qui veulent vous détruire. C’est des personnes qui ont les mêmes envies que vous, les mêmes rêves, qui ont les mêmes passions. Vous devez les respecter et faire attention de ne pas les dénigrer ou faire quelque chose qui ne serait pas moral, qui ne serait pas éthique vis-à-vis d’eux.
La responsabilité sociétale
Vous devez trouver votre place, sans chercher à détruire la place de quelqu’un d’autre. Tout le monde a le droit de vivre ses rêves et il y a de la place pour tout le monde dans ce type de métier.
Voilà, j’ai terminé ! Je vais quand même vous les récapituler les 7 responsabilités du porteur de projet animalier pour que vous soyez bien au clair avec.
La première, c’est une responsabilité juridique. Vous avez une responsabilité financière et économique. Vous avez une responsabilité envers vos animaux. Une responsabilité morale, une responsabilité familiale. Vous avez une responsabilité vis-à-vis de votre professionnalisme et de votre qualité et puis, une responsabilité sociale et sociétale.
Merci d’avoir lu cet article, et à bientôt !
Tristan FERRE, entrepreneur passionné
Fondateur des Entrepreneurs Animaliers
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