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La relation enfant / animal vue par la science de la communication

Dans cet article, nous développerons trois notions fondamentales dans la compréhension de la relation enfant / animal. Tout d’abord nous étudierons les trois niveaux d’intensité de relation possibles, ensuite nous découvrirons les 5 groupes d’animaux les plus riches en termes d’interactions avec les enfants, et enfin les 3 grands cadenas que les animaux peuvent déverrouiller chez un enfant.

Cet article est disponible en format écrit et audio, à vous de choisir !

Cela faisait longtemps que je voulais vous parler de la relation enfant / animal vue par des chercheurs en communication, et donc du point de vue de la sociologie humaine, et non de la passion animale, ou de la recherche sur les animaux.

Voici donc ma lecture (et mon interprétation) de différents ouvrages, notamment les écrits de Béatrice GALINON-MELENEC (publication des Universités de Rouen et du Havre) et de Hubert MONTAGNER (chercheur à l’Université Bordeaux 2), « Homme / Animal : quelles relations ? Quelles communications ? « , cités dans cet article.

Lire aussi  » L’animal médiateur, pour une bonne éducation de l’enfant « 

L’échelle des relations homme animal : trois niveaux de proximité

En fait, il y a quatre, étant donnée l’existence d’un niveau zéro, comprenant l’animal sauvage, qui n’a pas d’interaction régulière avec l’homme, et par extension, tous les animaux qui ne seraient pas dans l’un des trois niveaux suivants.

Être dans une relation utilitaire avec son animal n'empêche pas l'attachement
Être dans une relation utilitaire avec son animal n’empêche pas l’attachement

Niveau 1 : la relation utilitaire

C’est l’échelon le plus « brut » ou « basique » dans la qualité des interactions. L’animal dit « utilitaire » est « utilisé » dans un objectif précis d’aider l’homme dans une tâche de son quotidien (transporter, garder, chasser) ou d’apporter une compétence que l’homme n’a pas (recherche olfactive pour les chiens et cochons, sens de l’orientation avec les pigeons voyageurs).

La relation est principalement une relation d’interdépendance « ou chacun « attend » a priori de l’autre la satisfaction de ses besoins « basiques » » : équilibres biologiques, santé, survie du point de vue de l’animal ; besoins sociaux et économiques pour l’humain.

Dans une relation enfant / animal, les interactions sont stéréotypées, mais l’enfant peut déjà former l’idée que l’animal partage ses codes, ses émotions, ses affects, sa pensée, par projection et observation.

Le lapin nain est caractéristique d'une relation catégorisée "animal de compagnie"
Le lapin nain est caractéristique d’une relation catégorisée « animal de compagnie »

Niveau 2 : l’animal de compagnie

On appelle « animal de compagnie » un animal qui partage la même « niche écologique » que l’humain dont il dépend. Les motivations et besoins ne sont plus (seulement) utilitaires. L’homme acquière un animal de compagnie dans de nombreux buts :

  • assurer sa protection
  • limiter son sentiment de solitude,
  • apporter une solution au repli sur soi ou la marginalisation sociale d’un membre de la famille,
  • substituer ou compenser un être disparu,
  • apaiser ou de réassurer un individu,
  • donner confiance et estime de soi

Dans tous les cas, l’animal de compagnie est « contrôlé », ou « prisonnier » de son humain. Les situations de communication se limitent à des signaux répétitifs, où chacun attend une réponse normalisée de l’autre (le cochon d’inde qui couine pour demander à manger versus l’enfant qui se sent important, et aimé, par exemple)

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Niveau 3 : l’animal familier

« Il est considéré à la fois comme un ami qui fait partie de la famille, un confident qui peut tout voir et entendre, et un complice qui ne trahit pas et auquel on peut accorder sa confiance ».

La spécificité est que, outre les signaux stéréotypés et vitaux, il y a un grand nombre de signaux interspécifiques non imposés, non conditionnés, et qui semblent donc relever de la simple volonté. La communication est donc nuancée, complexe et diversifiée auprès des humains.

C’est dans ce cadre que l’enfant va se prêter à de nombreuses interprétations, qui ne sont pas forcément l’intention de l’animal, mais qui auront de réels effets sur l’enfant, sur sa personnalité, son développement et son comportement. Parmi les animaux les plus « capables » d’entrer dans le groupe des animaux familiers, Hubert Montagner en identifie 5, dans l’ordre d’importance : le chien, le chat, le cheval, le dauphin, le perroquet. Dans une moindre mesure, lapins, cobayes, chèvres et autres animaux peuvent prendre une telle place.

Une relation "familière" : l'animal de ce jeune garçon semble faire partie de sa famille
Une relation « familière » : l’animal de ce jeune garçon semble faire partie de sa famille

Une relation enfant / animal davantage stimulée avec ces 5 animaux – le groupe des animaux familiers

Parmi les animaux les plus « capables » d’entrer dans le groupe des animaux familiers, Hubert Montagner en identifie 5, dans l’ordre d’importance : le chien, le chat, le cheval, le dauphin, le perroquet. Dans une moindre mesure, lapins, cobayes, chèvres et autres animaux peuvent prendre une telle place.

Les chiens

Evidemment, le meilleur ami de l’homme est en première position. Probablement doit-t-il cette première place au podium à son attention permanente à ce que fait et dit son « maître », et de sa recherche permanente d’interactions affiliatives.

Les chiens peuvent ajuster leurs vocalisations, et leur langage corporel en fonction des contextes. L’enfant identifiera le chien comme son ami, parce celui-ci est attentif et très flexible, capable même d’anticiper ses actions grâce à des micro-signaux que l’enfant ne perçoit même pas de lui-même. C’est ce qui explique l’excitation du chien quand l’enfant s’apprête à jouer avec lui, alors qu’il n’a pas encore manifesté cette intention (le chien aura identifié des micro-signaux, comme un œil plus vif, un pied qui bouge différemment, une respiration différente).

Dans toutes les cultures du globe, on reconnait au chien des capacités d’attachement et de fidélité entre l’enfant (l’adulte aussi) et le chien.

Les chats

Les chats « donnent à leur humain l’impression ou la certitude qu’ils partagent ses émotions et ses affects », notamment grâce aux interactions œil-à-œil qui donnent l’impression que le chat peut lire ses pensées.

Cependant le chat alterne également avec des temps de pur égoïsme, ce qui le rend plus énigmatique et indépendant. L’enfant apprécie cela comme étant une ressemblance avec sa propre attitude.

Le registre du langage des chats est multiple (miaulement, ronronnement, regard, langage corporel), ce que l’enfant interprétera comme autant de signaux de communication interspécifique, et qui facilitera leur relation.

Les chevaux

Les chevaux (et les ânes !) ont une taille prépondérante par rapport à l’enfant, cependant ils se prêtent très facilement à une communication bilatérale, à travers un regard « profond et très expressif », et à travers leur sensibilité corporelle lorsqu’ils sont montés. Si l’équithérapie est très pratiquée auprès d’enfants ayant une forme d’autisme, c’est parce qu’ils peuvent communiquer avec le cheval autrement que par le langage verbal (très inhibé voir manquant chez eux) par le toucher, ce qui les rassure.

Les dauphins

Si les cas « d’amitié enfant-dauphin » sont effectivement rares, les dauphins entrent bel-et-bien dans ce palmarès, notamment parce qu’ils ont développé un langage très semblable à celui des humains. Ils sont capables de s’accorder sur un vocabulaire commun, ou du moins sur un référentiel de signaux compris des deux bords de la relation.

Le comportement du perroquet fascine les enfants (mais pas que !)
Le comportement du perroquet fascine les enfants (mais pas que !)

Les perroquets

Si le perroquet a une faible capacité d’attention soutenue, son expressivité, son imitation du langage humain et ses couleurs le rendent attractif auprès des enfants. Il n’est pas rare quand, dans un échange de signaux entre un perroquet et un enfant, chacun émette un signal qui n’a rien à voir avec ce qu’interprète l’autre, mais chacun se satisfera de sa propre interprétation. Ainsi l’enfant pourra projeter ses désirs et fantasmes sur son perroquet.

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Les trois cadenas de l’enfant, et comment les animaux peuvent les déverrouiller

L’animal et le déverrouillage du monde intérieur de l’enfant

Les animaux familiers jouent un rôle non négligeable dans la levée des blocages et des inhibitions de l’enfant. L’effet principal sera alors de créer une situation de sécurité affective, ou d’apaiser une insécurité affective. Comme son animal ne parle pas, alors l’enfant considère qu’il ne le jugera pas, ni le trahira. La relation de l’enfant avec son animal (notamment le chien) lui permettra alors de se détacher de ses difficultés personnelles ou familiales. On le compare un peu à un psychanalyste qui prend à coup sûr le parti de l’enfant (appuyés par l’attention du chien ayant l’air de compassion, le regard du chat profond, par exemple). L’animal permet souvent de calmer les pleurs d’un enfant pour ces raisons, car il rassure et apaise (effet anxiolytique davantage marqué chez les enfants tristes ou angoissés). L’enfant rejeté, moqué ou en détresse ira trouver refuge chez son animal familier.

Comment dévérouiller le monde intérieur d'un enfant ?
Premier cadenas de l’enfant : son monde intérieur

Chez les enfants en situation de handicap psychologique ou psychiatrique, l’augmentation des interactions avec un animal aura pour effet « l’atténuation ou la non manifestation des signes habituels de l’insécurité affective, c’est-à-dire des conduites autocentrées, sans raison apparente « mouvement pour le mouvement » ou enchaînements des actes d’agression ». La présence d’animaux dans les institutions médicalisées, ou au domicile, sont alors très bénéfiques à l’enfant en souffrance.

L’animal et l’activation des fonctions émotives et compétences socles de l’enfant

C’est seulement après le déblocage de ce monde intérieur, et l’augmentation de cette sécurité affective, que l’enfant pourra exprimer toute sa palette d’émotions, affects et fantasmes. Il pourra alors exprimer les 6 émotions « normalement innées » – joie, peur, colère, tristesse, surprise, dégoût – et les principaux états affectifs – amitié, jalousie, haine – qu’il aura appris par observation de son animal (chat en colère, chien qui exprime son dégoût pour une croquette, perroquet qui manifeste sa joie en criant, etc.).

Le développement de l’enfant sera alors activé, réactivé ou accéléré, ce qui se manifestera par une libération de « compétences socles » :

  • capacité d’attachement à plusieurs personnes
  • attention visuelle soutenue (le regard du chat et du perroquet aidant) avec un tiers, un objet ou l’environnement
  • les comportements affiliatifs dits « socialement positifs », à l’origine d’interactions de longue durée
  • les imitations
  • la structuration du geste

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Des compétences socles aux capacités cognitives : vers l’intellectualisation de l’enfant, par le contact de l’animal

L’évolution de l’enfant se complexifie et s’accélère alors. Après le déverrouillage de son monde intérieur et sa sécurisation affective, l’enfant développe ses compétences socles émotionnelles. Maintenant, il est complètement apte à « apprendre », dans le sens d’acquérir des connaissances et de nouvelles compétences.

Parmi elles, on relèvera :

  • l’apprentissage des codes familiaux et comportementaux par observation, et par essai-erreur
  • la connaissance du monde animal et biologique, de par les nombreuses questions qu’ils posent
  • l’envie de « faire plaisir » à leur animal
  • les capacités artistiques : l’enfant dessine, chante et écrit à propos de son animal

Leur capacité d’attention, de sélectivité, de curiosité, et leurs capacités d’induction et de déduction vont se décupler et permettre ainsi :

  • la transmission et l’apprentissage, puis l’augmentation du vocabulaire (les enfants vont pouvoir nommer ce qu’ils ont vécu avec des animaux)
  • l’utilisation des mots appris dans le contexte animal, dans des situations externes à la relation enfant-animal
  • l’incitation à l’écriture de textes libres dans lesquels les enfants vont décrire, structurer, imaginer et fantasmer sur ce qu’ils ont vécu ou aimeraient vivre avec leur animal
  • l’apprentissage de la routine qui découle de la présence d’un animal : soin, entretien, nourrissage, etc.
Une fois le troisième verrou libéré par l'animal, l'enfant va décupler son imagination, sa capacité de récit et de créativité. Il va intégrer son animal dans ses fantasmes et rêves...
Une fois le troisième verrou libéré par l’animal, l’enfant va décupler son imagination, sa capacité de récit et de créativité. Il va intégrer son animal dans ses fantasmes et rêves…

Le professionnel de la relation homme / animal qui veut participer au développement d’un enfant devra tenir compte de ses trois verrous

Dans la situation d’un.e professionnel.le du monde animal, confronté à des enjeux de développement d’un enfant, il conviendra alors :

– de porter attention au choix des animaux, en fonction des objectifs pédagogiques ou thérapeutiques identifiés

– de bien identifier les verrous que l’enfant n’a pas encore débloqués, afin de ne pas s’acharner à déverrouiller prématurément des compétences sans que les plus essentielles n’aient été acquises.

Le choix des activités, et du mode de mise en relation sera essentiel, pour bien se concentrer sur l’un (et un seul à la fois) de ces trois verrous.

Tristan FERRE
Consultant, coach et fondateur de la formation «Je lance mon projet animalier : médiation animale et fermes pédagogiques»

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